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Œuvre du mois - Fernand Flausch

ENTRE COMICS ET STREET ART, FERNAND FLAUSCH GAIEMENT POP



Fernand Flausch 
(Liège, 1948-2013) 
Clic-clic, 2012
Acrylique, collage, technique mixte sur toile (sans châssis)
206 cm x 181 cm 
Inv. BA.AMC.05b.2018.005216
© Photo Musées de la Ville de Liège
Acquis par la Ville de Liège en 2018

 

 

 

 

Reconnu internationalement dès l’âge de 25 ans, lors de la Biennale de Sao Paulo en 1973, l’artiste liégeois Fernand Flausch (1948-2013) a fait l’objet d’une rétrospective majeure au musée de La Boverie en 2018. Le 5 juillet 2023 marque le dixième anniversaire du décès de cet artiste trop tôt disparu. En cette occasion, le socle en béton de son oeuvre d’art public La Mort de l’automobile, installée depuis 1980 sur un axe routier du campus universitaire du Sart-Tilman, a été entièrement remis dans son état d’origine. 

La Boverie lui rend hommage en présentant Clic-clic, une oeuvre-phare de sa dernière décennie, réalisée en 2012, et acquise par le musée des Beaux-Arts en 2018. Elle synthétise différents apports que Flausch affectionnait dans ses oeuvres picturales, au travers d’une composition à la forte attractivité visuelle, aussi frappante que son format. Comme souvent chez Flausch, la base de cette toile que l’artiste a souhaité sans châssis est principalement réalisée à l’acrylique, au pinceau et à l’aérographe. On y retrouve une multitude d’éléments graphiques et d’indices culturels du 20e siècle. Grand amateur de bandes dessinées, influencé dès ses débuts par les « Nouveaux Réalistes » en France et par le Pop Art anglo-saxon des années 1960-70, Fernand Flausch s’est volontiers désigné comme un créateur « Néo-Pop ». À l’instar de nombreuses oeuvres qu’il réalise à cette époque, qui correspond malheureusement aux dernières années de son existence, Flausch se libère complètement de toute thématique théorique ou picturale particulière. L’artiste rassemble dans une folie débridée plusieurs figures emblématiques issues des « Comics » américains, des dessins animés, de la science-fiction, des jeux pour enfants, de la publicité, et ce qui constitue une grande part de la culture populaire – sans a priori péjoratif – comme la musique, les graffiti, ou encore le Street art. 
 

Dans cette véritable fresque en Technicolor qu’est Clic-clic, Flausch réunit des héros aisément reconnaissables et pouvant entrer en contact avec l’imaginaire de chaque spectateur. Sur scène apparaissent ainsi un cow-boy mettant le regardeur en joue, et dont les claquements de l’arme donnent le titre de l’oeuvre, une Catwoman très stylée à la chevelure flamboyante, une Blanche-Neige en pleine danse, un chevalier du Moyen-Âge complètement renversé, donc renversant. Trônant au centre de la toile, l’iconique Vache-qui-rit, hilare, est revisitée façon punk, flanquée de bananes en guise de boucles d’oreille, en lieu et place de ses boîtes de fromage fondu.
 

Flausch intègre également des éléments par le collage en 3D, comme une boîte pour une maquette à construire de porte-avions et un avion P39 Airacobra de la Seconde Guerre mondiale, ainsi que des figurines miniatures de guerriers du Far-West. Mixant, dans un débordement jaillissant, les époques, et puisant dans l’imagerie qui en restitue la symbolique, qu’elle soit guerrière, publicitaire ou culturelle, l’artiste y associe également les artifices picturaux de la représentation. Des onomatopées, des signes typographiques (point d’interrogation, d’exclamation), des étoiles scintillantes, des vrilles, des flèches et du graffiti, sont habilement utilisés, dans une gamme colorée gagnée par l’exubérance la plus joyeuse. Flausch, familier de l’univers du Marsupilami créé par le dessinateur de BD André Franquin, s’en approprie les couleurs jaunes et noires, tout en intégrant également, dans le bas de la toile, des tonalités aux fonds plus sombres. Elles peuvent tout autant signifier la nuit festive des feux d’artifice, que celle plus angoissante des explosions de munitions. Allusion possible au titre, à nouveau, et au tireur du haut de la composition.

De cette toile qui se regarde sans lunettes obligatoires, il émane une vitalité profonde, où l’oeil peut se perdre sans crainte de sombrer au fond du trou. Ainsi continue de s’éclairer l’oeuvre de celui qu’on a parfois surnommé Flausch Gordon, en référence au célèbre super-héros créé en 1934 par le dessinateur américain Alex Raymond.


Alain Delaunois
Attaché scientifique / Musée des Beaux-Arts

Bibliographie :

Fernand Flausch (1948-2013), catalogue de la rétrospective au musée de La Boverie, 
Ed. de la Province de Liège, Liège, 2018.
Fernand Flausch Rétrospective, Liègemuseum, bulletin des musées de la Ville de Liège, 
n°55, Liège, avril 2018.